Date et lieu
- 14 octobre 1805 à Elchingen, en Bavière.
Forces en présence
- Armée française (17 000 hommes), sous le commandement du maréchal Michel Ney.
- Armée autrichienne (16 000 hommes), sous les ordres du Feldmarschall-Leutnant Johann von Riesch.
Pertes
- Armée française : moins de 1 000 hommes tués ou blessés
- Armée alliée : 2 000 hommes tués ou blessés, 4 500 prisonniers
Panoramique aérien du champ de bataille d'Elchingen
La bataille d'Elchingen, dirigée par le maréchal Ney, vise à s'emparer du pont de la ville afin de permettre à son Corps de passer sur la rive gauche du Danube. La division du général Dupont de l'étang y est en effet isolée, ce qui pourrait permettre aux Autrichiens, s'ils s'en avisent, de briser l'encerclement que les manoeuvres de Napoléon leur ont préparé. L'engagement est un franc succès pour les Français. A son issue, les Autrichiens du général Mack sont définitivement piégés dans la ville d'Ulm.
La situation générale
En octobre 1805, le début de la campagne d'Allemagne voit Napoléon, par un large mouvement tournant, déborder l'armée autrichienne et se mettre en position d'investir la ville d'Ulm , auprès de laquelle se tient le général Karl Mack von Leiberich avec le plus gros de ses troupes.
Convaincu que l'ennemi va tenter de s'enfuir par le sud, l'Empereur fait passer la Grande Armée sur la rive droite du Danube [Donau], donc par le sud.
Mack, bien au contraire, tente sa chance sur la rive nord.
Par bonheur pour les Français, le général Pierre Dupont de l'Etang , isolé sur la rive gauche du fleuve à la tête d'une simple division du VIème corps de Michel Ney (6 000 hommes), réussit à lui couper la route au combat d'Haslach , et, en persuadant le commandant autrichien qu'il n'a encore affaire qu'à la simple avant-garde d'une force beaucoup plus puissante, l'amène à s'enfermer dans Ulm avec ses 20 000 soldats.
Napoléon ordonne alors à Ney et à Joachim Murat de reconquérir la rive nord du Danube et de soutenir Dupont. Cela passe par la prise du pont d'Elchingen . Le VIe corps va fournir le plus gros de l'effort.
Les armées
Armée française
Le maréchal Ney va attaquer à la tête de ce qu'il reste de son corps d'armée sur la rive sud : la 2ème division d'infanterie, du général Louis Henri Loison et la 3ème division du général Jean-Pierre Firmin Malher , qui s'est mise en mouvement très tôt le matin depuis sa position d'Oberfalheim , derrière la rivière Roth . Elles comptent respectivement 7 200 et 6 300 hommes, chacune disposant d'une demi-douzaine de bouches à feu.
Armée autrichienne
L'armée autrichienne est composée des deux divisions de Johann Ludwig Alexius von Loudon (ou Laudon) et Friedrich von Hessen-Homburg , de 7 000 hommes et six canons chacune. Le général Johann Sigismund von Riesch assure le commandement en chef. Cela représente une force de quatorze bataillons d'infanterie et onze escadrons de cavalerie, massée sur les collines dominant la rive nord du Danube, autour d'Unter-Elchingen, d'Ober-Elchingen, et de son couvent :
Deux bataillons et deux pièces d'artillerie contrôlent le pont [48.43794, 10.09376] lui-même.
Le champ de bataille
Le village d'Elchingen s'élève en amphithéâtre sur la berge à quelque distance du Danube; il est entouré de jardins clos de murs qui se dominent successivement, et un vaste couvent en couronne la sommité. C'est un des postes les plus formidables qu'on puisse imaginer.
(Antoine de Jomini, Vie politique et militaire de Napoléon, racontée par lui-même, au Tribunal de l'Histoire).
La bataille
Au matin de la bataille, le temps, exécrable depuis plusieurs jours, s'éclaircit quelque peu. A 8 heures, le maréchal Ney envoie la brigade d'Eugène-Casimir Villatte prendre le pont tenu par une garde autrichienne forte de 300 hommes et de deux canons.
Mais ce pont, en partie brûlé, privé de ses traverses, que les Autrichiens ont jetées dans le fleuve, il faut d'abord songer à le réparer avant de le franchir.
Le travail s'effectue à toute allure, sous la direction du maréchal en grande tenue, et malgré le feu nourri des tirailleurs ennemis qui se tiennent au débouché de l'ouvrage. Pilonnés à leur tour par l'artillerie française, ils doivent cependant bientôt s'abriter et ralentir la cadence de leur tir. La tâche des soldats du VIe corps en est facilitée.
Ce n'est toutefois pas sans de lourdes pertes humaines qu'ils parviennent enfin à construire un nouveau tablier avec les planches amenées par la brigade Villatte et les traverses récupérées contre les pilotis ou sur les rives du Danube.
Aussitôt, sans même attendre la fin du travail, une élite de voltigeurs, de carabiniers et de grenadiers franchit les dernières poutrelles du pont et en disperse les défenseurs.
Le maréchal Ney envoie derrière eux les deux régiments de la brigade Villatte sur la rive nord. Le premier (le 39ème d'infanterie) doit s'étendre sur la droite, dans la prairie qui borde le fleuve tandis que le second (le 6ème d'infanterie légère), avec Ney lui-même à sa tête, se portera à l'assaut du couvent et du village, occupés par le gros des forces autrichiennes.
Ralenti dans sa traversée du pont par la cavalerie française qui se précipite également vers la rive gauche, le 39ème ne parvient d'abord à faire passer que son 1er bataillon. Celui-ci, ayant à supporter seul la contre-attaque de la cavalerie autrichienne et de trois bataillons d'infanterie, est ramené au débouché du pont.
Mais quand le second bataillon du 39ème, puis la brigade de Claude Pierre Rouget (dit Le Batave) tout entière, traversent à leur tour, l'ennemi est repoussé. La prairie à droite du pont est aux mains des Français tandis que les Autrichiens doivent regagner les hauteurs .
Pendant ce temps, la brigade Villatte monte à l'assaut d'Ober-Elchingen, soutenue par les cavaliers du colonel Auguste François-Marie de Colbert-Chabanais . Le 6ème léger, avec Ney toujours au premier rang, s'empare de la lisière du village puis escalade, maison après maison, ses ruelles tortueuses, sous le feu plongeant de l'ennemi. Aux alentours de neuf heures, il atteint le couvent, qui couronne les hauteurs d'Elchingen, et s'établit sur le plateau.
Mais les Autrichiens tiennent toujours le bois qui s'avance, non loin de là, jusqu'à la lisière du village. Ils peuvent, depuis cette position, tenter un retour offensif et rejeter Ney sur le Danube.
Pour l'éviter, le maréchal envoie le 69ème s'emparer de ce secteur clé. Une fois la gauche française fermement fixée sur ce point, il entreprend de faire pivoter sa droite autour de cet axe et de balayer le plateau, qui se prolonge jusqu'au Michaëlsberg [48.41168, 9.98326], qui domine Ulm au nord-nord-ouest.
Les Autrichiens, qui se sont entre-temps formés en plusieurs carrés de 2 à 3 000 hommes, sont chargés par les dragons du général Jean-Baptiste Antoine Laplanche que suit l'infanterie organisée en colonne. La violence des attaques de cavalerie est telle que l'un des carrés met bat les armes. Les autres se retirent dare-dare qui vers Haslach puis sur le Michelsberg, qui vers Albeck .
Villatte, François Roguet et Colbert sont envoyés vers Kesselbronn. Le premier passe le ravin du même nom pour prendre possession des hauteurs et du bois d'Unter-Haslach ; le second s'empare de la route qui relie Albeck à Ulm et des bois qui sont en face d'Ober-Haslach .
Dans l'après-midi, Ney, pour éviter toute surprise et mieux protéger le pont d'Elchingen, revient établir sa droite sur les hauteurs d'Albeck , sa gauche vers Göttingen , tandis que Murat poursuit les restes des forces de Riesch.
Les suites de la bataille
La journée se solde par la perte de près de 7 000 hommes pour les Autrichiens contre moins de 1 000 pour les Français. Surtout, l'étau s'est encore resserré autour de la ville d'Ulm , où Mack est désormais définitivement enfermé.
En effet, au nord, la division Dupont a de son côté victorieusement combattu une nouvelle tentative du général Franz von Werneck de chercher un chemin de retraite sur la rive gauche du Danube, le rejetant partie sur Langenau et la route de Nerenstetten , partie sur Jungingen.
Tandis qu'au sud, le maréchal Jean Lannes, dans le même temps, a fait occuper le plateau de Pfühl, avec une avant-garde au village de Offenhausen .
Carte de la bataille d'Elchingen
Tableau - "Bataille d'Elchingen le 14 octobre 1805" par Camille Joseph Etienne Roqueplan.
Ney s'était querellé avec Murat peu avant la bataille, le prince ayant probablement cherché à faire endosser au maréchal les erreurs stratégiques qui rendirent ce combat nécessaire. Le comportement du futur duc d'Elchingen au cours de la bataille, présent en grande tenue à la tête de sa colonne partout où le danger était le plus grand, fut sa réponse à l'intrépide (mais parfois peu avisé) cavalier.
Napoléon récompensa les exploits du VIe corps en lui donnant la place d'honneur lors de la prise officielle d'Ulm et se souvint de ceux du maréchal en cette journée du 14 octobre 1805 lorsqu'il lui conféra, trois ans plus tard, le titre de duc d'Elchingen.
Un épisode de la bataille d'Elchingen figure sur la colonne de la Grande Armée à Wimille (Pas-de-Calais).
Témoignages
Cinquième bulletin (bis) à Elchingen, le 25 Vendémiaire an 14 (15 octobre 1805).
Aux combats de Wertingen et de Günzbourg ont succédé des faits d'une aussi haute importance, les combats d'Albeck, d'Elchingen, les prises d'Ulm et de Memmingen.
[...] D'un autre côté, le 19, l'ennemi fit une sortie du côté d'Ulm, et attaqua la division Dupont, qui occupait la position d'Albeck. Le combat fut des plus opiniâtres. Cernés par vingt-cinq mille hommes, ces six mille braves firent face à tout, et firent mille cinq cents prisonniers. Ces corps ne devaient s'étonner de rien : c'étaient les 9ème légère, 52ème, 69ème et 76ème de ligne.
Le 21, l'Empereur se porta de sa personne au camp devant Ulm, et ordonna l'investissement de l'armée ennemie. La première opération a été de s'emparer du pont et de la position d'Elchingen. Le 22, à la pointe du jour, le maréchal Ney passa ce pont à la tête la division Loison. L'ennemi lui disputait la possession d'Elchingen avec seize mille hommes ; il fut culbuté partout, perdit trois mille hommes faits prisonniers, un général-major, et fut poursuivi jusque dans ses retranchemens.
Le maréchal Lannes occupa les petites hauteurs qui dominent la plaine au-dessus du village de Pfuhl. Les tirailleurs enlevèrent la tête de pont d'Ulm : le désordre fut extrême dans toute la place.
Crédit photos
Photos par Lionel A. Bouchon.Photos par Marie-Albe Grau.
Photos par Floriane Grau.
Photos par Michèle Grau-Ghelardi.
Photos par Didier Grau.
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