Après la défaite du général Pierre Dupont de l'Etang le 22 juillet 1808 à Bailén en Andalousie, et celle de Jean-Andoche Junot le 21 août 1808 à Vimeiro au Portugal, l'Empereur Napoléon Ier décide d'intervenir personnellement en Espagne, à la tête d'une partie de la Grande Armée qu'il fait venir d'Allemagne.
La Sierra de Guadarrama, chaîne montagneuse au nord de Madrid
Nous allons détailler, au jour-le-jour, les déplacements de l'Empereur durant ces quelques semaines (entre le passage des Pyrénées à l'aller et celui au retour, on totalise 85 jours), en les illustrant d'une iconographie, qui ne manquera pas de s'enrichir à chacun de nos futurs séjours en Espagne.
Novembre 1808
- 3 novembre - Parti de Paris le 28 octobre, Napoléon arrive en compagnie de Géraud Christophe Duroc à Bayonne, au Pays Basque (département des Basses-Pyrénées, de nos jours les Pyrénées-Atlantiques). Il s'installe au château de Marracq, une de ses propriétés personnelles, dont il avait fait l'acquisition en mai 1808 [de nos jours : monument classé, mais en ruines depuis un incendie en 1825] . Il s'entretient avec Louis-Alexandre Berthier.
- 4 novembre - Il écrit à son frère Joseph qui se trouve à Vitoria [Vitoria-Gasteiz] et prend à partir de ce moment le contrôle total de l'armée et de l'administration. Parti dès l'aube accompagné des maréchaux Jean Lannes et Jean-de-Dieu Soult, il franchit la Bidassoa qui marque la frontière avec l'Espagne, et arrive à six heures du soir à Tolosa, au sud de Saint-Sébastien [San Sebastian / Donostia], où il est accueilli par le général Auguste Julien Bigarré , aide-de-camp de Joseph.
- 5 novembre - Il arrive dans la soirée à Vitoria , capitale de l’Alava, et élabore son plan de campagne sur la base des renseignements disponibles, alors même qu'il n'a pas l'ensemble de ses troupes sous la main (la Garde impériale et deux corps d'armée, les Ve et VIIIe, ne sont pas encore arrivés). Il y reste jusqu'au 9, logeant à la maison Etxezarra, propriété du banquier Fernando de la Cuesta, sise dans le quartier d'Ariznabarra, à l'ouest de la ville [à notre époque un quartier de Vitoria, 42.84114, - 2.68725].
- 9 novembre - Après avoir appris la victoire survenue l'avant-veille à Gueñès du maréchal François Joseph Lefebvre contre Don Joaquín Blake y Joyes , l'Empereur descend sur Armiñón, 25 kilomètres au sud-ouest.
- 10 novembre - Tandis que le maréchal Soult, à la tête du IIe corps, défait à Gamonal [aujoud'hui une banlieue à l'est de Burgos] l'armée d'Estrémadure du général Rámon Rufino Patiño y Pérez-Osorio, comte de Belveder (cet affrontement est également connu sous le nom de Bataille de Burgos), Napoléon continue vers Cubo de Bureba,à l'ouest-sud-ouest, où il campe.
- 11 novembre - Parti à une heure du matin, Napoléon et ses troupes atteignent avant le lever du jour Burgos, berceau de la Vieille-Castille, qui compte à cette époque 10 000 habitants. Il passe en revue les 108e et 109e régiments, ainsi que les unités d'artillerie du corps du maréchal Bon Adrien Jannot de Moncey Napoléon va demeurer à Burgos jusqu'au 22, logeant au Consulado del Mar [42.34020, -3.70270], où il recevra tous les soirs à dîner son frère Joseph.
- 12 novembre - Il donne des ordres pour procéder à un renforcement des défenses du château qui surplombe la ville.
- 13 novembre - Napoléon passe en revue les troupes du maréchal Michel Ney.
- 14 novembre - Il passe en revue la division du général Jean-Gabriel Marchand .
- 15 novembre - Il passe en revue la Garde et la division du général Jean-Joseph Dessolles .
- 22 novembre - Il se rend à Villa de Buniel puis à Tardajos, à l'ouest de Burgos, pour y passer en revue les divisions de Pierre Belon Lapisse et François-Amable Ruffin .
- 23 novembre - Après être repassé par Burgos où il a une entrevue avec son frère Joseph, Napoléon met le cap au sud et atteint vers 16 heurs Aranda de Duero , cité viticole réputée depuis le Moyen Âge. Il va y séjourner jusqu'au 29, s'installant au Palacio de los Berdugo [à l'actuel numéro 28 de la Calle Barrionuevo, 41.67192, -3.68706].
- 24 novembre - En fin de matinée, aux environs de la ville, il passe en revue la division du général Eugène-Casimir Villatte .
- 27 novembre - Il écrit à son frère Joseph, resté à Burgos, de venir le rejoindre.
- 29 novembre - Il quitte Aranda en milieu de matinée et se rend 40 kilomètres plus au sud, à Boceguillas . La maison de la Plaza Mayor destinée à l'héberger venant d'être détruite par le feu, une tente est dressée pour accueillir l'Empereur.
- 30 novembre - Afin de gagner Madrid, Napoléon doit franchir la Sierra de Guadarrama . Il passe par Cerezo de Arriba puis son armée s'engage, sous un épais brouillard, sur la route du col de Somosierra , très bien défendue par les Espagnols du général Benito de San Juan. Une terrible bataille lui permet d'atteindre et de passer le col, qui culmine à 1440 mètres . Au soir, il couche à Buitrago del Lozoya, à 17 kilomètres au sud du col.
Décembre 1808
- 1er décembre - Napoléon reprend sa marche cap au sud vers Madrid. Il passe par La Cabrera, où il déjeune, et bivouaque le soir à San Agostino [San Agustín del Guadalix] , à 40 kilomètres de Madrid.
- 2 décembre - Il arrive à Chamartín de la Rosa, un village de moins de 700 habitants [aujourd'hui un quartier du nord de Madrid] [40.47250, 3.68167] ; il s'installe au Nouveau Palais des Ducs de l'Infantado (Collège du Sacré-Coeur) [lequel n'existe plus de nos jours], tandis que ses troupes occupent l'oliveraie qui le jouxte. Il envoie un officier d'état-major du maréchal Bessières, puis un lieutenant-colonel espagnol prisonnier pour obtenir la reddition de la ville, tout cela sans effet.
- 3 décembre - Napoléon bivouaque devant Madrid, qu'il fait cannoner après un troisième refus des madrilènes de se rendre. Un assaut est ensuite donné, aboutissant à la prise des quartiers à l'est du Paseo del Prado. À cinq heures de l'après-midi, il reçoit au campement le général Tomás de Morla y Pacheco , l’un des membres de la junte militaire, et don Bernardo Yriarte , envoyé de la ville ; il les sermonne et leur accorde jusqu'au lendemain matin pour présenter la reddition de la cité
- 4 décembre - A six heures du matin, l'Empereur reçoit une délégation conduite par les généraux Morla et Fernando de la Vera y Pantoja, qui viennent signer la capitulation exigée la veille . Ce même jour, il signe des décrets abolissant les droits féodaux et l'Inquisition, réduisant d'un tiers le nombre de couvents et supprimant les barrières douanières entre les provinces du pays.
- 19 décembre - L'Empereur étant informé de la présence depuis le 14 à Salamanque [Salamanca] de 16 000 soldats anglais sous le commandement de Sir John Moore , il commence à élaborer une stratégie visant à détruire ce corps expéditionnaire.
- 22 décembre - Dans l'intention de rattraper l'armée du général Moore, Napoleon quitte Chamartin. Il laisse sous le commandement du roi Joseph le IVe corps (maréchal Lefebvre), deux divisions du Ier corps (maréchal Victor) et les divisions de cavalerie Lasalle, Milhaud et Latour-Maubourg. Ces troupes ont pour mission de maintenir la tranquillité dans la capitale, et de la couvrir contre toute attaque venant du sud. Il passe le col de Guadarrama (Alto del Leon , altitude 1115 m) [40.71015, -4.14019] sous la neige, des rafales de vent et un froid glacial. Au soir, l'Empereur bivouaque à l'auberge (La Fonda) de San Rafael, dépendant de la commune d'El Espinar [ce bâtiment, démoli en 1978, se trouvait à l'emplacement de l'actuelle Plaza de Castilla ] [40.71385, -4.18901].
- 23 décembre - Il est à Villacastin , logeant dans une maison de la Calle Real .
- 24 décembre - Il quitte Villacastin sous la pluie en fin de matinée, continue vers le nord-ouest et arrive à Arévalo, où se trouve la division Lapisse.
- 25 décembre - Napoléon arrive à Tordesillas, sur le Douro, où il s'installe à l'hospice dépendant du monastère royal de Santa Clara. Il y reçoit l'abbesse, Doña María Manuela Rascón, avec qui il a une discussion courtoise. Il y reste le 26.
- 27 décembre - Napoléon quitte Tordesillas de bon matin pour Medina del Rio Seco, à 45 kilomètres au nord. Le maréchal Jean-Baptiste Bessières lui fait visiter le champ de bataille où il a été victorieux de l'armée de Galice le 14 juillet précédent.
- 28 décembre - Suite à des renseignements reçus durant la nuit, Napoléon se met en route sous un temps exécrable en direction d'Aguilar de Campos [41.98498, -5.18038]. Puis il pousse sur Valderas.
- 29 décembre - Il est à Valderas alors qu'à Benavente la cavalerie anglaise sous les ordres d'Henry William Paget, 2e comte d'Uxbridge , défait les chasseurs à cheval de la Garde du général Charles Lefebvre-Desnouettes (ce dernier étant de surcroît fait prisonnier).
- 30 décembre - Il part le matin pour Castrogonzalo [41.98974, -5.60330] qu'il atteint à midi, puis arrive à Benavente [42.00302, -5.67408] où il reste deux jours, logeant à la maison de Núñez, sur la Plaza de los Bueyes [de nos jours Plaza del Grano] (Roger Iappini situe le quartier général au château de la ville).
Janvier 1809
- 1er janvier - Napoléon quitte Benavente vers le nord-nord-ouest, traverse l'Órbigo au pont de Cebrones (celui de La Vizana étant détruit) puis fait une longue halte pour attendre un courrier de Paris qui lui est annoncé. Les dépêches dont il prend connaissance le rendent particulièrement soucieux. Il termine sa route et atteint Astorga, ayant parcouru en tout 70 kilomètres dans la journée. Il s'installe dans le palais épiscopal de l'époque [à ne pas confondre avec l'actuel palais de Gaudí] ; il retrouve à Astorga le maréchal Soult, avec qui il s'entretient. Une légende locale veut que Napoléon ait échappé à une tentative d'assassinat par un parent de l'évêque que l'Empereur avait délogé.
- 2 janvier - L'Empereur passe en revue les divisions du général Henri François Delaborde et du général Louis Henri Loison . Il donne par ailleurs l'ordre au maréchal Soult de poursuivre les Anglais jusqu'à la mer.
- 3 janvier - Napoléon apprend que la retraite des Anglais est bien avancée, et reçoit de Paris l'information qu'une agression de l'Autriche contre la France semble se préparer. Il prend donc la décision de rentrer et quitte Astorga, en direction de Valladolid. Il couche à nouveau à Benavente, où il va rester jusqu'au 6.
- 6 janvier - Il repasse par Medina del Rio Seco et arrive à Valladolid, où il prend résidence au Palais des rois de Castille [Palacio Real], sur la Plaza de San Pablo. Il y reste jusqu'au 17.
- 16 janvier - Il reçoit une députation, venue de Madrid pour lui présenter des procès-verbaux d'allégeance au roi Joseph.
- 18 janvier - Napoléon prend à cheval, au grand galop, en compagnie des généraux Anne Jean-Marie René Savary et Géraud Duroc ainsi que du mamelouk Roustam Raza, le chemin de la France et arrive à Burgos, 120 kilomètres plus loin au nord-est, en quelques cinq heures (Jean Tulard et Louis Garros placent cet épisode le 17). Là, il monte en voiture (des relais étant mis en place à cet effet de Burgos à Bayonne), et passe par Tolosa comme à l'aller en novembre.
- 19 janvier - Napoléon passe la frontière, traverse Bayonne où il fait une courte pause au château de Marracq et atteint Tartas, dans les Landes .
- 20 janvier - Il prend la direction de Paris, où il arrivera le 23 après être passé par Mont-de-Marsan, Bordeaux et Poitiers.
Les campagnes de Napoléon au jour le jour
Tous les déplacements de Napoléon de 1769 à 1821
Crédit photos
Photos par Lionel A. Bouchon.Photos par Didier Grau.
Photos par Michèle Grau-Ghelardi.
Photos par Marie-Albe Grau.
Photos par Floriane Grau.
Photos par des personnes extérieures à l'association Napoléon & Empire.