Comte de l'Empire
Prononciation :
Lazare-Nicolas Carnot vient au monde le 13 mai 1753 dans la maison familiale à Nolay (dans l'actuel département de la Côte d'Or) d'un père de petite noblesse, avocat au parlement de Bourgogne. Cette origine lui permet d'entrer, en 1771, à l'école du génie de Mézières, où sont passés avant lui Louis-Alexandre Berthier et Gaspard Monge. Il en sort deux ans plus tard avec une commission de lieutenant et rejoint le corps des ingénieurs du prince de Condé.
Chevalier de Saint-Louis, auteur en 1784 d'un premier traité scientifique remarqué, il n'est pourtant encore que capitaine lorsque la Révolution éclate. Il s'y montre immédiatement favorable et présente à l'assemblée Constituante, dès 1789, un mémoire recommandant la saisie des biens du clergé.
Élu député du Pas-de-Calais à l'assemblée Législative, il devient un membre influent du comité militaire. Réélu à la Convention, on l'envoie, à peine la session ouverte, organiser la défense de la frontière d'Espagne, ce qui fait de lui le premier des représentants en mission.
Il part ensuite pour l'armée du Nord avec un groupe de commissaires chargé d'arrêter Charles François Dumouriez (avril 1793). L'absence purement fortuite de Carnot, lorsque ses collègues se présentent devant le général, est grosse de conséquence. Car Dumouriez réagit en s'emparant des commissaires et en les livrant à l'ennemi autrichien, ce qui leur vaudra une captivité de trente mois. Si Carnot avait été présent, y aurait-il eu un autre « organisateur de la victoire » ?
Bientôt porté au Comité de Salut Public ‒ en juillet 1793, quinze jours après Maximilien Robespierre et contre l'avis de celui-ci ‒ il prend en charge l'essentiel des affaires militaires. N'hésitant pas à s'entourer d'officiers d'ancien régime qui le secondent avec zèle, il parvient à mettre sur pied en quelques mois une douzaine d'armées regroupant plus d'un million d'hommes. Cet immense effort porte rapidement ses fruits et à la fin de 1793, la situation militaire, désespérée quelques mois plus tôt, est rétablie. La bataille de Wattignies (16 octobre), considérée par Napoléon comme la plus importante des années 1792-93, est le point d'orgue de cette période. Carnot, ce jour-là, non content de diriger les opérations, n'hésite pas à payer de sa personne.
Durant les mois qui suivent Carnot poursuit son oeuvre organisatrice. Jusqu'au 9 thermidor. Sa notoire mauvaise entente avec Robespierre lui évite alors de trop graves ennuis. Mais il faut cependant, pour lui épargner l'arrestation, ce cri du coeur d'un obscur député : Oserez-vous porter la main sur celui qui a organisé la victoire dans les armées de la République ?
Élu membre du Conseil des Anciens en 1795, il est choisi comme Directeur et se heurte aussitôt à Paul-François de Barras, qui lui conteste la conduite des affaires de la guerre. Les revers subis lors des campagne de 1795 et 1796 sur le Rhin, conduites selon ses plans, entament sa réputation militaire et son crédit. De même que les premières victoires acquises par Napoléon Bonaparte, qui ne fait la guerre que selon ses propres conceptions.
Lazare Carnot se rapproche alors des milieux contre-révolutionnaires et se met à favoriser, avec son collègue Balthazar François de Barthélémy, les préparatifs d'une restauration monarchique. Le coup d'État du 18 fructidor an V met fin à ces projets. Carnot doit s'enfuir. Il trouve refuge en Allemagne d'où il attaque violemment ses anciens collègues dans des pamphlets que le Comte de Provence fait réimprimer à ses frais et distribuer à Paris.
Revenu en France après le 18 brumaire, il devient un fugace ministre de la Guerre (2 avril - 8 octobre 1800), sa mauvaise entente avec Napoléon Bonaparte entraînant rapidement sa démission. Après quoi il rentre dans la vie privée et se consacre à des études scientifiques. On l'en tire en 1802 pour le nommer au Tribunat. Mauvais calcul. Il s'y montre zélé républicain et opposant résolu, votant successivement contre la Légion d'Honneur, contre le consulat à vie, contre l'Empire.
Après la suppression du Tribunat, en 1807, Carnot reprend ses activités mathématiques. De mauvais placements l'ayant ruiné, il se tourne vers Napoléon 1er qui lui accorde généreusement le secours demandé et lui commande, pour faire bonne mesure, un traité sur la défense des places fortes, destiné aux élèves de l'École de guerre. L'ouvrage, publié quelques mois plus tard, en 1810, est, au dire de l'Empereur, fort mauvais et reste inutilisé.
En janvier 1814, les alliés approchant, Carnot offre ses services à Napoléon 1er. Ceux-ci sont immédiatement agréés, au motif que le seul nom de Carnot peut rallier à l'Empire vacillant bien des gens incertains sur le parti à prendre
, comme l'écrit Carnot lui-même. La défense d'Anvers lui est confiée. C'est là qu'il apprend, le 4 avril 1814, par un parlementaire anglais, que les alliés sont à Paris. Il refuse cependant de rendre la place tant qu'il n'en aura pas reçu l'ordre d'un gouvernement français régulièrement établi. C'est chose faite le 16 avril.
Il se soumet alors à Louis XVIII. Mais l'audience royale qui lui est accordée se révèle si froide ‒ il est régicide ‒ que ses espérances déçues ‒ et les tortueuses intrigues de Joseph Fouché ‒ le poussent à publier un mémoire dont la thèse est que le parti royaliste et surtout l'émigration, donc le Comte de Provence, sont les principaux responsables de la mort de Louis XVI.
Au soir de son retour, Napoléon 1er le nomme comte et ministre de l'Intérieur. Quelques jours plus tard, il le fait pair. Carnot déploie pourtant durant la période une activité bien réduite et son comportement durant les derniers jours de l'Empire est quelque peu incohérent. Il annonce la défaite de Waterloo à la chambre des pairs avec un calme étonnant tout en prônant au conseil des ministres la levée en masse et l'état de siège. Il pleure en faisant ses adieux à Napoléon 1er mais accepte le lendemain de participer au gouvernement provisoire, peut-être avec l'espoir d'en devenir le président. Mais cette fois encore Fouché joue plus finement que lui.
Après la capitulation, qu'il a lui-même proposée, Carnot est compris dans l'ordonnance de proscription du 24 juillet 1815 et doit quitter Paris, puis la France. D'abord accueilli à Varsovie, il y devient persona non grata du fait des manifestations de sympathie excessives ‒ au gré des autorités russes ‒ que lui témoignent les patriotes polonais. Il se tourne alors vers la Prusse, qui lui interdit la région rhénane mais l'autorise à s'établir à Magdebourg.
Lazare Carnot y meurt le 2 août 1823 et y est inhumé à la Johanneskirche. En 1889, la commémoration du centenaire de la Révolution française occasionne le transfert de ses cendres au Panthéon de Paris , caveau XXIII .
"Lazare Carnot" par Louis-François Lejeune (Strasbourg 1775 - Toulouse 1848).
Napoléon, s'il ne reconnaissait à Carnot nul talent militaire, le tenait pour un honnête homme et un grand travailleur. C'était aussi, et peut-être surtout si l'on souscrit au jugement précédent, un savant de premier ordre à qui l'on doit en physique la loi de conservation du travail et qui peut être considéré comme l'un des fondateurs de la géométrie moderne. Il fut enfin, avec Gaspard Monge, le créateur de l'École polytechnique.
Le ministère de la guerre, lorsque la défense d'Anvers fut confiée à Carnot, s'aperçut que celui-ci n'était toujours que chef de bataillon... On le fit alors passer en un moment par les grades de lieutenant-colonel, colonel et général de brigade, pour enfin en faire un général de division. Il avait soixante et un ans et rejoignait enfin les Lazare Hoche, François Marceau, Jourdan ou Napoléon Bonaparte qu'il avait distingués et promus vingt ans plus tôt.
Philatélie : Les Postes de la République Française ont émis en 1950 un timbre de 10,00 F à l'effigie de Lazare Carnot.
Sur le devant de sa maison natale à Nolay, une statue de bronze de Lazare Carnot honore sa mémoire .
Son nom est inscrit sur la 4e colonne (pilier Nord) de l'arc de triomphe de l'Étoile.
Autres portraits
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"Lazare Carnot". Ecole française du XIXème siècle.
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"Lazare Carnot", par Charlemagne Oscar Guet (Meaux 1801 - Paris 1871).
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"Lazare-Nicolas-Marguerite Carnot" par Louis-Léopold Boilly (La Bassée 1761 - Paris 1845).