N & E
Napoléon & Empire

Opérations militaires de la seconde Campagne d'Italie (1800)

Lorsqu'il prend le pouvoir, le 18 brumaire an VIII (9 novembre 1799), Napoléon Bonaparte hérite d'une situation militaire stabilisée. Les dangers courus par la France au cours de l'année 1799 ont été conjurés par les victoires d'André Masséna en Suisse et Guillaume Brune en Hollande. Néanmoins, la seconde coalition reste menaçante.

Les Autrichiens disposent en effet de troupes nombreuses en Italie et en Allemagne :

  1. dans la vallée du Pô, l'armée du général Michael von Melas  rassemble 130 000 hommes ;
  2. dans celle du Danube [Die Donau], l'archiduc Charles d'Autriche, puis le Feldzeugmeister Pál Kray von Krajova und Topolya  en commandent 120 000 autres.

Face à elles, la France déploie :

  1. au nord, repliés sur la rive gauche du fleuve, les 150 000 soldats de l'armée du Rhin qui obéissent à Jean-Victor Moreau ;
  2. au sud, refoulés sur Gênes [Genova] et la Riviera, les 40 000 combattants de l'armée d'Italie, sous les ordres d'André Masséna.

Ces forces, séparées par les Alpes  et la Suisse, sont en outre minées par l'indiscipline, la désertion et un ravitaillement défaillant.

Création de l'armée de Réserve

Très vite, dès le 14 frimaire an VIII (5 décembre 1799), le Premier consul ordonne la création d'un Corps de Réserve qu'il veut installer à l'articulation du dispositif français. Ainsi placée, cette unité surveillerait la Suisse − récemment entrée dans l'orbite française − et serait en mesure de secourir l'une ou l'autre aile selon les besoins.

Prévue pour compter 40 000 hommes, cette formation se constitue lentement. On tire ses effectifs de Bretagne et de Vendée, où la pacification est achevée, de l'armée d'Italie et des dépôts de l'armée d'Orient. L'artillerie se rassemble à Auxonne  , la cavalerie à Dole ; l'infanterie se répartit entre Dijon, Saulieu, Beaune et Bourg-en-Bresse.

En avril 1800, Alexandre Berthier reçoit la direction théorique de cette armée dite de Réserve. Le Premier consul a en effet préféré s'abstenir d'en prendre officiellement la tête, aussi bien pour ne pas inquiéter les républicains vétilleux que pour préserver le caractère essentiellement civil de sa fonction. En mai, lorsque Bonaparte entre en Suisse, ce sont 36 000 combattants qui le suivent.

Plan d'opérations initial

Le plan des opérations confie au départ la tâche principale à l'armée du Rhin, la paix ne pouvant se gagner qu'en Allemagne. Bonaparte envisage d'ailleurs en premier lieu de s'y rendre pour superviser l'offensive. Tout en laissant Moreau y commander, il se réserverait le rôle de généralissime, lui seul pouvant imposer la stricte coopération indispensable entre les trois armées (celle du Rhin, cell d'Italie, celle de Réserve).

La manoeuvre prévue exige, de plus, vitesse et audace alors que la réputation de Moreau repose d'abord sur sa prudence. Pour le Premier consul, se trouver sur place paraît donc de première nécessité afin d'impulser le dynamisme nécessaire à la victoire.

Objections de Moreau

Mais Moreau refuse aussi bien d'être chapeauté que d'appliquer le plan conçu par Bonaparte. Aux termes d'une véritable négociation menée à Paris entre Jean-Joseph Dessolles , son chef d'état-major, le Premier consul et le ministre de la Guerre Lazare Carnot, Moreau obtient, par écrit, les aménagements qu'il souhaite aux combinaisons envisagées.

N'ayant pu imposer sa volonté à un subordonné protégé par le prestige dont il jouit, le Premier consul inverse son schéma. Ce qu'il n'ose pas faire sur le Rhin, je vais le faire sur les Alpes, décide-t-il.

Plan de secours

Les nouvelles dispositions prévoient que l'armée de Réserve franchira les Alpes  pour fondre sur Melas, pris ainsi en tenaille entre cette dernière et l'armée d'Italie, positionnée autour de Gênes. Le rôle de l'armée du Rhin se limite désormais à fixer en Souabe [Schwaben] les forces de Pál Kray. Elle doit les empêcher de porter secours à Melas en Lombardie.

Toutefois, cette manoeuvre ne peut conduire à des résultats aussi décisifs que celle initialement envisagée. La paix ne peut en découler. En l'occurrence, Bonaparte se montre peut-être trop déférent à l'égard de Moreau, auquel il continue de prodiguer les marques d'amitié. Probablement ne juge-t-il pas son autorité suffisamment établie pour punir l'insubordination d'un général très populaire. Si bien que le Premier consul refuse à Berthier les mesures de fermeté que celui-ci réclame à l'encontre du récalcitrant.

Offensive autrichienne sur la Riviera

Les Autrichiens passent à l'offensive en Italie le 6 avril 1800. Face à eux, Masséna a malencontreusement divisé ses 40 000 hommes en deux corps. Le premier, entre Nice et le col de Tende [44.14958, 7.56181], garde la frontière française ; Louis-Gabriel Suchet le commande. Le second, avec Jean-de-Dieu Soult à sa tête, surveille les abords de Gênes.

Cette disposition produit bientôt des effets délétères. Les Autrichiens repoussent Suchet sur le Var, Soult à Savone [Savona]  et Masséna, son armée coupée en deux, en est réduit à se replier sur Gênes puis à s'y retrancher.

Le 9 avril, l'ennemi entame le siège de la ville. Masséna, qui sait depuis la réception d'un courrier du Premier consul, quelques jours plus tôt, qu'il n'obtiendra ni renforts, ni vivres, ni matériel, n'a plus qu'à attendre l'arrivée de l'armée de Réserve. D'ici là, il lui faut tenir, en comptant sur les sorties pour se ravitailler.

Préliminaires en Allemagne

Mais l'intervention en Italie suppose que Moreau entame au préalable ses opérations en Allemagne. Or il se montre d'une lenteur désespérante. Ce n'est que le 24 avril qu'il commence à franchir le Rhin, après une mise en demeure véhémente du Premier consul. Le 1er mai, toute son armée est enfin massée sur la rive droite du fleuve.

Stockach tombe le 3 mai, Moesskirch [Meßkirch] le 5. Moreau s'installe ensuite à Augsbourg [Augsburg]  et Munich [München] , sans avoir livré bataille à Pál Kray, qui peut se retirer sur Ulm  sans même avoir à passer le Danube pour se protéger. Une fois en Bavière [Bayern], Moreau replonge dans sa léthargie.

L'essentiel, toutefois, est acquis. L'armée du Rhin coupe aux Autrichiens la route de la Bavière et du Tyrol. Moreau ne se croit pas en mesure de faire davantage, d'autant que le ministre de la Guerre, Carnot, lui a enjoint d'envoyer Claude Jacques Lecourbe  et ses 25 000 hommes garder les cols du Saint-Gothard et du Simplon. Non sans avoir au préalable vigoureusement protesté, Moreau se contente finalement de dépêcher 14 000 soldats vers le Saint-Gothard, sous les ordres de Bon Adrien Jannot de Moncey. Puis il s'immobilise.

La Seconde Campagne d'Italie jour après jour  La Seconde Campagne d'Italie jour après jour

Début de la campagne

Parallèlement à ces opérations allemandes, l'armée de Réserve a continué à se concentrer, officiellement à Dijon, en réalité à Genève et sur la rive nord du lac Léman  , dans le plus grand secret. Grâce à l'habileté de Berthier et Carnot, les Autrichiens ne s'en avisent pas.

Choix de l'itinéraire

Plusieurs voies s'offrent pour descendre en Italie. Sont d'abord considérées celles qui passent par la haute Italie :

  1. La route de Zurich [Zürich] à Milan [Milano]  par le col du Splügen et le lac de Côme [Lago di Como] . C'est la première envisagée par le Premier consul ;
  2. La route entre les deux mêmes villes par le Saint-Gothard et la vallée du Tessin [Ticino].

Toutes deux nécessitent le concours de l'aile droite de Moreau. D'où les détachements réclamés à ce dernier.

À la fin du mois de mars 1800, l'éventualité d'employer un chemin situé plus à l'ouest commence à être évoquée. Il permettrait de se porter plus rapidement au secours de Masséna. Après quelques tergiversations, c'est finalement l'option qui est choisie.

Reste à arbitrer entre les cols du Valais. Le 27 avril, Bonaparte tranche. Celui du Grand-Saint-Bernard [45.86896, 7.17060] est préféré à ceux du Mont-Cenis et du Simplon. Bien que le moins aisé à franchir des trois, il présente des avantages autres : un trajet plus court, une route carrossable jusqu'à Bourg-Saint-Pierre   , à six ou sept kilomètres du sommet. La partie la plus délicate du parcours ne mesure ensuite qu'une vingtaine de kilomètres.

Outre sa commodité, des raisons stratégiques militent également pour cet itinéraire.

  1. En premier lieu, la situation se dégrade sur la côte méditerranéenne (à tel point que le 11 mai, Nice tombera aux mains des Autrichiens). Pouvoir s'y porter rapidement est donc important.
  2. En second lieu, cette route débouche sur un carrefour donnant accès au sud vers le Piémont [Piemonte], à l'est vers la Lombardie. De ce fait, la direction définitive de l'attaque pourra se décider au dernier moment, en fonction des circonstances.
  3. De plus, en surgissant avec l'armée de Réserve par la vallée d'Aoste, le Premier consul se retrouvera au centre d'un dispositif qui prévoit aussi l'arrivée de 4 000 soldats par le Mont-Cenis sous le commandement de Louis Marie Turreau , de 5 000 autres sous Joseph Chabran  par le Petit-Saint-Bernard, de la division Antoine de Bethencourt par le Simplon et des 12 000 hommes que Moncey amène de l'armée du Rhin par le Saint-Gothard.
  4. Enfin, même si elle échoue dans son offensive, l'armée française, ayant pris le contrôle de ce passage, bénéficiera d'une ligne de retraite assurée.

Départ du Premier consul

Le 6 mai, Bonaparte quitte Paris. Officiellement, il se dirige sur Dijon en vue d'une inspection. S'il s'y arrête effectivement le 7, le Premier consul poursuit aussitôt son voyage pour rallier Genève où il entre le 9 avant l'aube.

Le temps de donner à Jean Lannes le commandement de l'avant-garde, à Joachim Murat celui de la cavalerie, le temps surtout d'étudier la route du Grand-Saint-Bernard avec le général Armand Samuel de Marescot , inspecteur du Génie et le voilà reparti pour Lausanne, où, le 12, il passe en revue les divisions Chambarlhac et Loison dans la plaine de Saint-Sulpice à l'ouest de la ville [46.51021, 6.54634]

La plaine de Saint-Sulpice près de Lausanne
La plaine de Saint-Sulpice, à l'ouest de Lausanne, sur la rive nord du lac Léman

Le lendemain Napoléon passe en revue la division Boudet sur la place du Marché de Vevey  . Il se porte le 16 sur Saint-Maurice-du-Valais   , puis le lendemain sur Martigny , où il installe son Quartier Général   [46.10028, 7.07356].

Passage du Grand-Saint-Bernard par l'armée de Réserve

L'avant-garde, précisément, a quitté Martigny l'avant-veille, pour s'engager sur les pentes  du col. Les deux mille mètres de dénivellation jusqu'au sommet  (à l'altitude de 2 469 mètres) nécessitent huit bonnes heures d'ascension, du moins pour les fantassins.

Les chevaux, sur ce terrain, se montrent plus lents que les hommes. Les artilleurs encore davantage, qui doivent tirer les troncs d'arbres évidés au creux desquels ont été déposées leurs pièces démontées (les chariots à roulettes prévus à leur usage se révèlent inadaptés). La tâche s'avère si rude que les paysans recrutés pour l'accomplir ont décampé après quelques heures de travail.

Le côté suisse du col du Grand-Saint-Bernard, vu depuis le monastère situé au sommet
Le côté suisse du col du Grand-Saint-Bernard, vu depuis le monastère situé à son sommet. Photo de Lionel A. Bouchon

Une fois le col franchi, l'avant-garde française se hâte en direction d'Ivrée [Ivrea]. Elle pousse devant elle un millier de Croates, délogés d'Etroubles , qui reculent sur Aoste  puis Châtillon. Le 18, elle entre dans ce bourg.

Résistance du fort de Bard

Mais le lendemain, Lannes et les siens butent sur le fort de Bard    qui domine la vallée  de la Doire Baltée [Dora Baltea]   à une quinzaine de kilomètres de son débouché dans la plaine du Pô. La puissance de ses défenses a été sous-estimée : quatre cents militaires y servent vingt-six canons.

C'est assez pour interdire le passage de l'artillerie française, qui ne peut, à la différence de l'infanterie et de la cavalerie, contourner l'obstacle par des chemins de montagne, comme celui qui passe par Albard et Rovarey, que le Premier consul en personne empruntera un peu plus tard.

Le village d'Albard, à l'est du fort de Bard
Le village d'Albard, qui surplombe le fort de Bard à l'est de celui-ci

Pendant ce temps, les différentes divisions terminent à leur tour l'ascension du Grand-Saint-Bernard. Le dernier corps − la garde consulaire − franchit le col le 20 mai, en compagnie de Bonaparte. À rebours de la représentation héroïque que David donnera plus tard de l'épisode, le Premier consul se déplace pour l'occasion à dos de mulet, animal au pied plus sûr que le cheval. Le 21, il arrive à Aoste.

À ce moment, le verrou de Bard est sur le point de sauter. Après trois jours de paralysie et alors que le Premier consul fulmine, Auguste de Marmont a trouvé la solution. Afin de franchir l'obstacle le plus furtivement possible, l'unique voie qui court au pied de la forteresse est jonchée de fumier, les roues des affûts enveloppées de paille et des soldats prennent la place des chevaux comme animaux de trait. Les batteries se faufilent ensuite nuitamment sous les murs de la citadelle. Malgré ces précautions Marmont évalue les pertes à 5 ou 6 hommes par voiture.

La progression peut alors reprendre :

  1. Le 22 mai 1800, l'avant-garde de Lannes s'empare d'Ivrée.
  2. Le 26, à quelques kilomètres au sud de la ville, se tient le combat du pont de la Chiusella      [45.412863, 7.88211]. La 6ème division légère, les 22ème et 40ème divisions affrontent à la baïonnette la cavalerie du général Károly József Hadik von Futak  et la mettent en déroute.
  3. Le 28, l'avant-garde atteint les rives du Pô à Chivasso .

La première partie de la campagne se révèle un franc succès. Les Autrichiens, persuadés que Bonaparte va voler à la défense de Nice , l'attendent du côté de Suse [Susa]. Ils le voient surgir dans leur dos.

Suite et fin de la campagne

Suprise des Autrichiens

Le général en chef autrichien, Melas, a été informé dès le 21 mai du passage du Grand-Saint-Bernard par l'armée française, mais il est convaincu qu'il ne s'agit que d'une diversion. Il temporise jusqu'au 28 avant de se porter à Coni [Cuneo] avec 10 000 hommes. Là, il se rend compte que les Français menacent bel et bien sa ligne de retraite et se met en mesure de défendre la rive droite du Pô en rassemblant 30 000 combattants autour de lui.

Bonaparte à Milan

De son côté, Bonaparte décide finalement de se diriger sur Milan. Ce choix résulte d'un ensemble de considérations, certaines plus pertinentes que d'autres, mais qui, en bloc, justifient pleinement ce mouvement :

  1. D'une part, Bonaparte, malgré les messages de plus en plus alarmants de Masséna, ne croit pas à la chute de Gênes. Il estime la place trop difficile à prendre d'assaut pour que les Autrichiens y parviennent. C'est compter pour peu la famine qui sévit entre les murs de la ville, menaçant de pousser la population à la révolte contre une armée française exténuée, qui arrive en outre au bout de ses ressources en munitions.
  2. D'autre part, l'objectif assigné à l'armée d'Italie est d'ores et déjà atteint. En s'enfermant dans Gênes, Masséna a fixé les Autrichiens pendant le passage des Alpes  par l'armée de Réserve. De surcroît, les combats qu'il a menés autour de la cité et ceux que la division Suchet a soutenus dans le Var ont coûté à l'adversaire le tiers de ses effectifs.
  3. Le rétablissement de la République cisalpine, que le Premier consul a l'intention de proclamer en arrivant à Milan, constituera à son avis une telle menace que Melas devra en tenir compte. En grand danger d'être coupé de ses bases, le général autrichien ne pourra que lever le siège de Gênes, rassembler ses troupes et tenter de s'ouvrir de force un chemin vers le Tyrol [Tirol] et l'Autriche.
  4. À Milan, enfin, Bonaparte sait, pour l'avoir déjà vécu en 1796, qu'il sera accueilli comme un libérateur.

Il y entre finalement le 2 juin.

Réaction autrichienne

Lorsqu'il comprend la situation, Melas réagit comme prévu en renonçant à la prise de Gênes et en rappelant les unités opérant en France. Il compte rassembler le tout autour d'Alessandria, ville sur la rivière Tanaro qui possède une imposante citadelle de construction moderne   .

Le Feldmarschalleutnant Peter Karl Ott von Bátorkéz , qui assiège Gênes, reçoit l'ordre de se retirer le 2 juin, le jour même où Masséna se résigne à entamer des pourparlers. En conséquence, le général autrichien diffère son départ et la convention (Masséna a refusé de signer tout document qui comporterait le terme de capitulation) est ratifiée le 4. L'héroïsme de sa résistance et l'impatience de ses adversaires permettent à Masséna de négocier des conditions avantageuses. Ses hommes, en particulier, sont autorisés à rejoindre la France pour y reprendre le combat. Ils vont donc y renforcer Suchet, qui va bientôt réoccuper les Alpes-Maritimes et la Riviera, évacuée par les Autrichiens.

Melas se retrouve de fait avec une armée enfermée dans la plaine piémontaise.

Passage du Pô par les Français. Concentration à Stradella

S'il veut en sortir, il lui faudra bousculer l'armée de Réserve qui fonce vers le Pô pour prendre position aux différents points de passage possibles. Le 3 juin, le général Guillaume Philibert Duhesme  entre à Lodi , sur la rivière Adda  ; le 4 Murat atteint Plaisance [Piacenza], sur le Pô ; le 6, les Français, passés sur la rive droite, se concentrent à Stradella .

Le choix de cette position ne doit rien au hasard. En ce point, les contreforts des Apennins [gli Appennini] s'approchent au plus près du fleuve. La route d'Alessandria à Plaisance s'en trouve resserrée dans un étroit corridor, facile à bloquer. Placée là, tenant les ponts depuis Belgioioso jusqu'à Crémone [Cremona], l'armée française barre la ligne de retraite la plus probable des Autrichiens, tout en restant capable de se projeter vers le Tessin ou la plaine lombarde si l'ennemi emprunte un autre chemin.

Avancée vers Alessandria

La nouvelle de la chute de Gênes, reçue le 8 juin, fait craindre à Bonaparte que Mélas ne s'y enferme à son tour ou ne tente effectivement de s'échapper par le nord et la région des lacs. Il décide donc de prendre l'offensive : 24 000 hommes marchent sur Voghera , en direction d'Alessandria. Le Premier consul lui-même quitte Milan le 9 juin pour rejoindre ses troupes.

Le même jour, Lannes et son avant-garde affrontent avec succès, à Montebello [45.00111, 9.10438] et ses alentours, le corps d'armée du général Ott remontant de Gênes.

Casteggio, qui a changé plusieurs fois de main au cours de la bataille de Montebello
Casteggio, qui a changé plusieurs fois de main durant la bataille de Montebello

Marengo et fin des opérations

Le 13 juin, constatant l'inaction des Autrichiens consécutive à leur défaite à Montebello, Bonaparte se porte en avant. L'ennemi reste introuvable. Certaines informations laissent penser qu'il est parti vers le nord. Elles se révéleront erronées. Elles apparaissent toutefois d'autant plus crédibles qu'elles reproduisent sans le savoir des débats qui agitent l'état-major autrichien. Nombre de ses membres estiment en effet qu'éviter le combat n'offrirait que des avantages. Ils proposent de franchir le Pô à Casale, de marcher sur le Tessin que les Français ont dégarni et de prendre ainsi l'ennemi en tenaille entre le gros de l'armée autrichienne et les nombreuses places fortes que ses garnisons tiennent toujours dans le Piémont.

Dans la crainte que sa proie ne lui échappe, le Premier consul expédie à sa recherche les divisions de Jean-François de Lapoype  et Louis Charles Antoine Desaix. Le premier inspectera les environs de Valenza, au nord ; le second, récemment rentré d'Égypte, ceux de Novi [Novi Ligure], au sud.

En conséquence, lorsque la bataille de Marengo s'engage, 31 000 Autrichiens, munis d'une centaine de pièces d'artillerie, affrontent 20 000 Français, à peine équipés de 25 bouches à feu.

Le combat tourne d'abord à l'avantage des Autrichiens, au point que Melas transmet vers cinq heures du soir le commandement à ses lieutenants. Mal lui en prend. Le retour de la division Desaix, attirée par le son du canon ou prévenue par Bonaparte, et surtout une charge décisive des dragons de François Étienne Kellermann (le fils du vainqueur de Valmy) font basculer la victoire dans le camp français. Les Autrichiens se replient sur Alessandria par le pont sur la Bormida, laissant le terrain de bataille aux troupes de Bonaparte.

Le pont sur la Bormida, entre Alessandria et Marengo
Le pont sur la Bormida, entre Alessandria et Marengo [44.90553, 8.64538]

Cette victoire française est toute relative, d'ailleurs, car Melas conserve les moyens de la contester. Il accepte pourtant dès le lendemain de signer un armistice très préjudiciable aux intérêts autrichiens. Son armée se retire sur le Mincio et livre toutes les places fortes qu'elle tient encore en Italie du nord, y compris la ville de Turin [Torino] .

Conséquences

La propagande consulaire saura donner du lustre à un succès militairement peu éclatant. À l'encontre de ses déclarations publiques, le Premier consul ne se berce pas d'illusions sur les circonstances de la bataille et la part qu'il y a prise. Des témoignages de contemporains le prouvent. Il compte bien, en revanche, tirer tout le profit possible du résultat. Avant même la campagne, il a écrit à son frère Joseph : Une victoire me laissera maître d'exécuter tout ce que je voudrai. La suite lui donnera raison.

En définitive, la seconde Campagne d'Italie représentera pour Napoléon Bonaparte un triomphe politique bien plus que militaire.

Carte de la campagne d'Italie de 1800

Batailles napoléoniennes - Carte de la seconde campagne d'Italie (1800)

Crédit photos

  Photos par Lionel A. Bouchon.
  Photos par Didier Grau.
  Photos par Michèle Grau-Ghelardi.
  Photos par Marie-Albe Grau.
  Photos par Floriane Grau.
  Photos par des personnes extérieures à l'association Napoléon & Empire. Merci à MM. Ugo Valfer (photos de la citadelle d'Alessandria) et Cyril Maillet (photos aériennes des Alpes) pour leur amicale contribution.